Les résultats des difficiles consultations gouvernementales
29 mars 2023L'Allemagne est souvent présentée à l'étranger comme le pays du compromis politique : beaucoup de décisions sont prises sur la base de négociations plutôt que par l'instauration d'un rapport de force. Mais cette fois-ci, les trois partis qui composent le gouvernement de coalition ont eu besoin de trois longs jours pour réussir à se mettre d'accord. Et à éviter une crise politique majeure.
A en croire le chancelier Olaf Scholz "Ça valait la peine".
Sept points principaux
Le SPD d'Olaf Scholz, les écologistes et les libéraux du FDP sont parvenus à arrondir les angles dans deux grands domaines : la protection du climat et le secteur des transports. Leurs décisions portent sur sept points principaux :
- Une loi sur le climat
L'économie allemande doit tendre vers la neutralité climatique. Les textes de lois actuels prévoient des objectifs chiffrés à chaque secteur de l'économie (l'énergie, le bâtiment, les transports). Or ces objectifs sont difficiles à atteindre, selon le ministre libéral des Transports.
Le gouvernement a donc résolu d'assouplir les textes en mettant en commun les émissions de CO2 de tous les secteurs pour faire un calcul global et trouver des solutions qui dépassent les secteurs pris individuellement.
- Une loi sur l'efficacité énergétique
Le gouvernement entend accélérer le développement des énergies renouvelables et améliorer l'efficacité de la consommation d'énergie. Les nouveaux objectifs devront être atteints dès 2030.
- Davantage de surfaces consacrées aux énergies renouvelables
Pour pouvoir construire des parcs solaires ou éoliens par exemple, les communes auront davantage de libertés dans l'attribution des terrains. Les terrains en bordure de routes, d'autoroutes et de chemins de fer seront privilégiés pour accueillir des panneaux solaires et des éoliennes.
- Planification accélérée
Cette loi est censée faciliter l'adoption de nouveaux tracés pour 144 autoroutes. Les Verts et le FDP se sont beaucoup opposés sur ce texte : les écologistes voulaient promouvoir avant tout la construction de chemins de fer.
Par ailleurs, ce texte doit accélérer la rénovation des nombreux ponts endommagés du pays.
- Financement du rail
Le gouvernement estime que la Deutsche Bahn, qui gère les chemins de fer allemands, a besoin de près de 45 milliards d'investissements d'ici 2027. Une partie de ces fonds proviendra de l'augmentation des péages autoroutiers pour les poids lourds.
- Carburants de synthèse
Les libéraux du FDP défendent les carburants de synthèse qui émettent aussi du CO2. Le gouvernement va encourager la recherche scientifique et la production pour que ces carburants puissent être vendus dans les stations essence.
Ces carburants permettraient de maintenir les moteurs à combustion que l'Union européenne veut interdire à l'horizon 2035, mais auxquels tiennent notamment les constructeurs automobiles allemands.
- Le chauffage
La proposition de loi sur l'introduction de modes de chauffage plus écologiques est adoucie. Elle suggère que, "dans la mesure du possible", chaque chauffage provienne à partir de 2024 d'au moins 65% d'énergies renouvelables.
Les réactions
Ces conclusions, âprement négociées, voici ce qu'en disent les trois partis de gouvernement : les sociaux-démocrates (SPD) sont satisfaits, ils sont parvenus à ménager les libéraux et les écologistes. Selon le SPD, les nouvelles mesures permettront à l'Allemagne de maintenir sa puissance économique tout en amorçant la transition énergétique.
Le président du groupe parlementaire libéral (FDP) se félicite des nouvelles infrastructures qui vont être construites et salue "le plus important paquet de mesures de modernisation de ces dernières décennies".
Satisfaction affichée également chez les Verts, bien que mesurée. La présidente du parti écologiste estime qu'il faudra rediscuter de certains points. Elle insiste sur le fait que chaque nouveau kilomètre d'autoroute qui sera construit devra obligatoirement être équipé de panneaux solaires.
A droite, la tête du groupe CSU au Bundestag ironise sur la faible portée des annonces et le tout "petit dénominateur commun" trouvé par les trois partis de la coalition.
A gauche, au contraire, die Linke rejoint certaines organisations de défense de l'environnement qui reprochent au gouvernement – et principalement aux Verts – d'avoir capitulé devant le FDP et bradé les réglementations pour la protection du climat.
Le chef de la Deutsche Bahn, Richard Lutz, qualifie les investissements prévus dans le rail de "jalon réel pour le réseau ferroviaire du futur".
Et pour finir, les organismes sociaux critiquent le fait que les partis de gouvernement n'aient pas bien placé ses priorités : les trois partis n'ont pas planché sur l'avenir des allocations de base pour les enfants.