Pourquoi les ADF attaquent-ils les jeunes en Ouganda ?
20 juin 2023La litanie de l’horreur retient qu'une attaque similaire a déjà eu lieu à la fin des années 1990 dans la région de Bunyoro, dans l'ouest de l'Ouganda , causant aussi la mort de nombreux lycéens.
L’identité des auteurs de l'attaque survenue le week-end dernier n'a toujours pas été révélée et les rebelles de l'ADF, très vite accusés, n'ont toujours pas revendiqué ce massacre.
Pourquoi viser des écoles?
Depuis près de trois décennies que cette rébellion existe, son mode opératoire a toutefois consisté à attaquer des écoles, non pas uniquement pour tuer, mais aussi pour recruter des combattants.
Mais selon Kassim Kayira, journaliste et expert de la région Grands Lacs , cette attaque avait cette fois d'autres visées :
"Quelquefois, l'objectif c'est le recrutement. Les lycées sont ciblés lorsqu'ils cherchent des recrues pour cette rébellion. Mais on peut constater que le langage a changé. Ils ont voulu créer une onde de choc en tuant ces élèves. C'est profond. C'est le cœur du pays qu'ils ont touché".
Le même avis est partagé par Boniface Musavuli, écrivain et spécialiste des questions sécuritaires dans la région des Grands lacs.
Cependant, celui-ci estime que si l'enquête en cours concluait à la responsabilité des ADF, il faudrait y voir un lien avec l'opération que les armées ougandaise et congolaise mènent contre leurs positions depuis plus d’un an.
"La première chose qui me vient à l'esprit est qu'une école est une cible facile. Il n'y a que des enfants qui ne sont pas en capacité de se défendre. Donc, si l'on veut frapper les esprits, on s'attaque à une école. S'il s'agit des ADF, il faut rappeler qu'ils ont été quand-même durement frappés par l'armée ougandaise, et qu'ils cherchent ainsi à se venger sur le sol ougandais" explique l'expert à la DW.
Disfonctionnements au sein de l'armée ougandaise
Kassim Kayira estime par ailleurs que cette attaque est aussi un défi et un coup porté à l'armée ougandaise .
Selon lui : "Si ce sont les ADF, cela aura eu pour objectif de montrer les lacunes au sein même du système de défense ougandais. C'est comme pour dire : nous avons fait plus de 90 kilomètres en venant de la RDC pour vous montrer que nous sommes toujours là, même si vous pensez avoir écarté le danger. Il est difficile d’imaginer que l'intervention de l'armée ougandaise n'est arrivée que deux heures après l’attaque. Cela montre qu'il y a des lacunes dans cette institution".
Le président ougandais Yoweri Museveni a d'ailleurs évoqué ce disfonctionnement lors d'une récente déclaration, insinuant que les rebelles auraient pu bénéficier de complicités au sein même de l’armée ougandaise.