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Civile ou militaire, telle est la question de la transition

Paul Lorgerie
11 septembre 2020

Alors que la transition au Mali est toujours en discussion, la contestation peine à se mettre d'accord sur le rôle des militaires.

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Des supporters du CNSP, le 5 septembre à Bamako
Des supporters du CNSP, le 5 septembre à BamakoImage : Getty Images/AFP/M. Cattani

Au Mali, les 500 délégués censés s’entendre sur un format de transition ont travaillé ce vendredi (11.09.20) sur la charte qui la définira. Etablie par un comité d’experts dits indépendants, cette charte préconisait ce matin une transition de deux ans avec un président désigné par le Comité national pour le salut du peuple, le CNSP, composé des militaires qui ont renversé le régime d’Ibrahim Boubacar Keïta.

Si le document a été soumis à la révision des délégués, la question de la direction de l’entre-deux démocratique divise les Maliens et provoque la colère de certains membres du Mouvements du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP), dont une poignée a montré son mécontentement dès l’ouverture des concertations à Bamako.

Les yeux rougis par les gaz lacrymogènes que venaient de tirer les forces de l’ordre pour disperser la foule, Bakary Keïta, membre de la jeunesse du M5-RFP, regrette la tournure que prennent les événements :

"Progressivement, les militaires sont en train de s’approprier le pouvoir. Ils ont pris un acte fondamental alors que la Constitution existe. C’est une remise en question implicite de la Constitution qui existait déjà. Donc progressivement le Mali est en train de se diriger vers un régime militaire."

Alors qu’il s’est battu pour renverser le régime IBK, il réclame aujourd’hui que le président de la transition soit un civil.

Concertations

Mais ses opposants ne sont pas loin, eux aussi réunis autour du Centre de conférences où se déroule la concertation politique en cours.

Transition au Mali : écoutez le sujet dans sa version audio

Arborant un portrait du colonel Assimi Goïta, Adama Mahamadou Ballo, de la Coordination de soutien au CNSP, a un avis tout autre sur la question :

"Sans équivoque, il faut que cette transition soit gérée par les militaires car c’est l’unique couche sur laquelle les Maliens peuvent se reposer pour un rebond sur la refondation et la réorganisation de l’Etat. »

Depuis quelques jours, on voit apparaître des manifestations de soutien aux militaires au pouvoir composées de Maliens qui, comme Adama Mahamadou Ballo, ont fait partie du M5-RFP avant le coup d’Etat du 18 août.

"Echec des politiques"

Cette situation ne surprend pas Abdoulaye Guindo, coordinateur de la plateforme de bloggeurs Benbere :

"Ils ont raison quelque part. Face à l’échec des politiques à régler leurs problèmes depuis l’avènement de la démocratie en 1991, pour eux, ce sont les militaires qui peuvent régler leurs problèmes. Malheureusement, ils n’ont pas de recul par rapport aux événements. »

Lui et ses collègues ont lancé le 25 août le hashtag #MaTransition sur les réseaux sociaux.

Avec 1007 mentions sur Facebook et 890 sur Twitter en deux semaines, il observe que trois tendances se dégagent sur la toile :

"Les bloggeurs, les influenceurs, dans leur majorité, préfèrent une transition dirigée par un civil, mais technocrate et non politicien. Certains internautes au service des politiciens souhaitent une transition civile dirigée par des politiciens, et de l’autre côté, on a cette foule qui n’analyse pas les choses qui préfère les militaires à la tête de la transition."

Pour le moment, aucun nom n’a filtré sur le futur gouvernement et sur celui qui dirigera la transition. Bien qu’une réponse doive se préciser dans les jours à venir.