Covid-19 au Nigeria : les religions mènent le combat
25 décembre 2021Barakat Abiola, 18 ans, est dans la queue à Lagos, la plus grande ville du Nigeria. La jeune musulmane s’est rendue à la mosquée pour la prière de vendredi. A côté de la mosquée se trouve un centre de vaccination. Barakat Abiola veut se faire vacciner.
"L’imam m’a dit que je devais venir ici pour me faire vacciner contre la Covid-19 parce que j’ai 18 ans. Il me l'a demandé et c'est pour cela que je suis venue ici", explique-t-elle à l'AFP.
Les réticences au sein de la population sont énormes. Pourtant, le pays a reçu plus de dix millions de doses du dispositif Covax et cinq autres millions de l’Allemagne.
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Lieux de culte stratégiques
Du coup, passer par les Églises et les mosquées pourrait accélérer la campagne de vaccination, selon Atinuke Onayig, un responsable de santé. Cela a bien fonctionné pour la vaccination contre la poliomyélite, dit-il :
"Les églises et les mosquées sont des lieux stratégiques vers lesquels beaucoup de personnes se ruent les jours de culte comme le vendredi ou le dimanche. Nous essayons donc d'en profiter."
Historiquement, les lieux de culte ont toujours été des points d'ancrage pour les campagnes de vaccination de masse.
C'est aussi parce que les leaders et les institutions religieuses jouissent d'un grand pouvoir et surtout d'une grande confiance au Nigeria, explique Abubakar Umar Kari, sociologue et politologue de l'université d'Abuja.
"La religion joue un rôle très important. Les gens décident plus facilement de faire confiance à leur prêtre ou à leur imam qu'à leurs dirigeants politiques. Cela fait partie de notre système culturel", observe Abubakar Umar Kari.
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Lente vaccination
De nombreux Nigérians se méfient profondément de l'Etat et des décideurs politiques. La campagne de vaccination piétine et la confiance est importante pour sa réussite.
Le taux de vaccination contre la Covid-19 reste très bas : moins de 3% des Nigérians sont entièrement vaccinés sur une population de plus de 200 millions d’habitants.
Cette semaine, le Nigeria a détruit plus d’un million de doses périmées du vaccin AstraZeneca. La plupart des vaccins sont livrés avec moins d’un mois d'avance sur la date de péremption.
Le pays le plus peuplé d’Afrique a enregistré un pic des infections depuis qu'il a détecté le variant Omicron à la fin du mois de novembre : une augmentation de 500% du nombre de cas au cours des deux dernières semaines.
Selon le pasteur Simon Donli, responsable d’une association engagée dans le dialogue interreligieux, "les zones rurales sont notre défi. Il y a beaucoup de peur et des théories du complot, et il y a aussi beaucoup de propagande via les réseaux sociaux."
Il ajoute que "certaines personnes pensaient que les vaccins devaient éliminer les Africains ou les Noirs. Mais maintenant, avec l'éducation donnée par les leaders religieux, cela recule lentement".
Le Nigeria compte officiellement 225.000 personnes infectées par la Covid-19 et près de 3.000 décès. Abuja souhaite faire vacciner d’ici la fin de l’année prochaine, environ 112 millions de personnes, soit 70% de la population adulte.