Journée sans presse en Guinée pour dire "non" aux pressions
23 mai 2023Les associations de presse ont appelé ainsi à protester contre les propos du ministre et porte-parole du gouvernement, Ousmane Gaoual Diallo, qui a menacé de fermer des médias qui se montreraient trop critiques envers la junte au pouvoir. Les journalistes dénoncent également les pressions des autorités militaires. Le mot d'ordre de cette journée semble avoir été bien respecté à travers le pays.
"Le off total"
Studios fermés, salles de rédactions vides, le groupe Hadafo Media a largement observé la Journée sans presse lancée par les syndicats de la presse privée de Guinée. "Nous avons fait un off total aujourd'hui des différents médias du groupe. Il y a Radio Espace, Espace TV, il y a Sweet FM et il y a Kalac Radio et Kalac TV et c'est le off total. Au niveau de la télé nous avons une bannière Journée sans presse ce mardi pour être solidaire de la décision qui été prise" a expliqué à la DW Moussa Yéro Bah, directrice de l'information de la Radio Espace Guinée.
Même atmosphère à la radio Fim FM, ou le mot d'ordre est également suivi à la lettre.
"Depuis cinq heures ce mardi, conformément à la décision prise par les associations de presse, nous avons éteint complément la radio et ce jusqu'à zéro heure pour observer la consigne qui vise à tirer la sonnette d'alarme sur les menaces qui pèsent contre la presse" explique-t-on à la radio.
Ce sont les médias privés qui se sont le plus mobilisé contre les atteintes des autorités de la transition militaire envers la liberté de la presse. Mais même les médias d'Etat ont décidé d'accompagner le mouvement. Martin Fansinadouno, membre du syndicat des travailleurs de la radio-télévision nationale, la RTG a précisé à la DW les actions menées dans ce sens.
Cette journée sans presse a déjà affecté les auditeurs, téléspectateurs et internautes guinéens, comme en témoigne Ariette, une habitante de Conakry.
"Nous n'avons pas d'information, pas de nouvelles, les réseaux sociaux sont coupés les radios, les sites… rien ne marche. Et être sans presse c'est comme être privé de l'eau. Il faut que le gouvernement arrête de priver les gens de leur liberté d'expression" estime-t-elle.
"Velléité de museler la presse"
Les professionnels de l'information dénoncent régulièrement le harcèlement, l'intimidation, les menaces, les refus de délivrance ou de renouvellement des licences aux médias pratiqués par la junte au pouvoir.
Mais cette fois, le ministre des Postes et Télécommunications et porte-parole du gouvernement est allé plus loin, soutien Sékou Jamal Pendessa, secrétaire général du syndicat des professionnels de la presse de Guinée.
Selon lui : " La goutte d'eau qui a fait déborder le vase, c'est cette sortie médiatique provocatrice de Ousmane Gaoual Diallo qui a menacé de fermer les radios et d'en assumer toute la responsabilité, oubliant que ce rôle est dévolu à la Haute autorité de la communication. Et on voit derrière sa communication toute une velléité de museler la presse. Donc on s'est dit que c'est le bon moment pour se lever".
Nos tentatives pour joindre le ministre Ousmane Gaoual et la Haute autorité de la communication sont restées vaines.
Si rien n'est fait pour garantir la liberté de presse et d'expression dans le pays, les syndicats des médias envisagent des manifestations et le retrait de leurs représentants au Conseil national de la transition et à la Haute autorité de la communication.