Journée pour l’élimination de la discrimination raciale
21 mars 2024Le 21 mars 1960, la police de Sharpeville, en Afrique du Sud, réprima dans le sang une manifestation pacifique contre les lois racistes sur les laissez-passer, en plein contexte d'apartheid. 69 personnes perdirent la vie ce jour-là.
Six ans plus tard, en octobre 1966, l'Assemblée générale des Nations Unies proclama la création d'une Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale, qui se tient, depuis, tous les 21 mars, en commémoration de cette tragédie.
Définitions
Les termes sont souvent employés sans que, la plupart du temps, on connaisse bien la différence entre racisme, xénophobie ou encore ethnicisme.
Pourtant, la différence est assez claire. Le racisme est une idéologie eugéniste qui affirme la supériorité d'une race sur une autre, alors même que le concept de race est une erreur : il n'y a qu'une seule race humaine sur la Terre.
La xénophobie, en revanche, est la peur de l'altérité, la peur de l'étranger, d'une culture ou encore d'une orientation sexuelle différente.
Le Burundais David Gakunzi, journaliste et écrivain, revient sur ces concepts : "Le racisme, d'abord, ce sont des mots et des actes. Des mots, c'est-à-dire une vision du monde, qui essaye de catégoriser, de diviser notre humanité en races, en catégories biologiques, mais qui va au-delà de la catégorisation, qui affirme qu'il y aurait une hiérarchisation des humains selon leur couleur de peau, selon leur origine, et qui peut produire aussi des politiques de ségrégation et de discrimination. Je dirais enfin que c'est un discours de légitimation des dominations.
La xénophobie est différente. C'est essentiellement la haine, la peur de l'étranger. Les cas les plus concrets, par exemple, dernièrement, c'était notamment, quand on prend l'Afrique, la question de l'ivoirité en Côte d'Ivoire."
Une vision du monde fermée
Le concept d'ivoirité avait été lancé dans les années 1990 par le deuxième président ivoirien, Henri Konan Bédié. Destiné à définir l'identité culturelle ivoirienne, il est très vite devenu délétère dans un pays caractérisé par une importante main d'œuvre étrangère, notamment en provenance du Burkina Faso.
Enfin, il y a la haine des autres ethnies, un phénomène répandu sur le continent africain.
"Et l'ethnicité, c'est une façon, je dirais, très pernicieuse, de mettre en avant son ethnie au détriment des autres, explique David Gakunzi. En Afrique essentiellement, c'est une arme de conquête ou de préservation du pouvoir, c'est une arme de manipulation et de division de la population."
L'intellectuel burundais poursuit : "Dans les trois cas, on retrouve une vision du monde fermée, une vision du monde qui conduit nécessairement à la violence, et surtout une vision du monde, notamment dans le cas de la xénophobie et du tribalisme, qui est bâtie autour du bouc émissaire.
Donc dans toutes ces visions du monde, on retrouve cette façon un peu étriquée de voir le monde et de refuser ce qui fait notre humanité, de refuser l'universalité de l'humain."
Discours racistes
David Gakunzi touche enfin un sujet sensible en raison de l'histoire du continent : il ne faudrait pas fermer les yeux, selon lui, sur le phénomène du racisme entre Africains :
"A partir du moment où il y a essentialisation, discrimination, ségrégation et violence, du fait des origines des gens, il y a un discours fascisant, il y a un discours raciste. Ce n'est pas parce que nous avons été victimes du racisme, nous autres noirs, que nous ne serions pas capables du racisme aussi."
Mais le racisme est bien entendu encore présent dans le reste du monde. A ce sujet, cette année est la dernière de la "Décennie internationale des personnes d'ascendance africaine", initiée par les Nations unies. Ce sont donc les personnes noires, vivant en dehors de l'Afrique, qui sont plus particulièrement prises en compte.