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Juillet 1990: un pas de plus vers la réunification

22 juillet 2010

La rencontre du 14 au 16 juillet 1990, en Russie, entre le chancelier de la République fédérale d'Allemagne, Helmut Kohl et le président de l'URSS Michaïl Gorbatchev va sceller définitivement l'avenir de l'Allemagne.

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Helmut Kohl, Michaïl Gorbatchev et Hans-Dietrich GenscherImage : picture-alliance/ dpa

A cette époque, les négociations concernant la réunification du pays vont bon train. Le mur de Berlin est tombé neuf mois plus tôt, les premières élections libres en République démocratique allemande ont eu lieu en mars et depuis le 1er juillet une seule monnaie, le Deutsche Mark, circule à l'Est comme à l'Ouest. Une question de taille reste cependant en suspens : celle de l’alliance militaire à laquelle appartiendra la future Allemagne. C’est pour régler cet épineux problème que Helmut Kohl se rend en Russie du 14 au 16 juillet 1990.

Pariser Konferenzen 1954 - Vertragsunterzeichnung
Le 23 octobre 1954, les accords de Paris valident l'entrée de la République fédérale d’Allemagne dans l'OTAN.Image : picture-alliance/ dpa

Au moment où Helmut Kohl et sa délégation montent dans l’avion à l’aéroport de Bonn – Bonn qui, à cette date, est encore la capitale – personne, mais vraiment personne, ne pressent ce qui va se passer. Le président de l’URSS, Michaïl Gorbatchev, ne s'est toujours pas prononcé clairement sur la question de la neutralité de l'Allemagne alors que pour Helmut Kohl, il n'y a pas à discuter: l’Allemagne unifiée ne peut que devenir membre de l’Otan, l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord, une Alliance qui à l'origine avait notamment pour vocation de faire contrepoids à la puissance militaire de l'Union soviétique.

Invitation personnelle

Dès les premiers pourparlers le 14 juillet, à Moscou, il apparaît rapidement que Michail Gorbatchev a infléchi sa position et qu’il ne s’opposera pas à l’entrée de l’Allemagne unifiée dans l’Otan, autrement dit à l’entière souveraineté du pays. Preuve de sa bonne volonté : il a invité Helmut Kohl à venir dans sa région natale : Stavropol, aux pieds des montagnes du Caucase, au sud de Moscou. Un geste très personnel que le chancelier allemand interprète, à raison, comme un signe positif pour la suite des pourparlers.

Bundeskanzler Helmut Kohl bei Gorbatschow in Moskau 10.2.1990
Helmut Kohl en février 1990 à Moscou. Michail Gorbatchev lui fait part de ses réticences concernant une possible Réunification allemande.Image : picture-alliance/ dpa

Michaïl Gorbatchev accepte effectivement l’idée que l’Allemagne unifiée soit 100% souveraine, ce qui implique qu’elle peut choisir d’appartenir à l’alliance militaire de son choix. En échange de cet accord, l’Allemagne s’engage notamment à renoncer aux armes ABC, A pour atomiques, B pour bactériologiques, C pour chimiques.

A l’issue des discussions, les deux dirigeants donnent une conférence de presse commune, retransmise en direct par les télévisions russe et allemande. Conférence au cours de laquelle Helmut Kohl souligne l’importance historique de ces entretiens caucasiens :

« Je pense que cette rencontre constitue une nouvelle apogée dans l’histoire des relations germano-soviétiques. Cela concerne à la fois la densité et l’intensité de nos discussions, que ce soit à Moscou, dans l’avion ou ici sur la terre natale du président Gorbatchev »

Sagesse soviétique...

Helmut Kohl zu Arbeitsbesuch im Kaukasus
Signe de réconciliation: Michaïl Gorbatchev donne à Helmut Kohl un bouquet de fleurs cueilli par sa femmeImage : dpa

Le revirement de l’URSS, qui cinq mois plus tôt, en février, ne voulait pas entendre parler d’une adhésion à l’Otan, s’explique par la situation intérieure du pays et par la clairvoyance de Michail Gorbatchev. Bloquer la résolution de la question allemande revenait à isoler encore un peu plus l’Union soviétique sur le plan international. Cette certitude, Markus Meckel, le ministre des Affaires étrangères du premier gouvernement librement élu de l’Allemagne de l’Est, se rappelle l’avoir très clairement exprimée à son homologue soviétique, Edouard Chevardnadze

« Je lui ai dit très franchement : l’unification allemande est en chemin et si vous tentez de la freiner, elle se fera sans vous – auquel cas nous aurons un problème commun. Nous n’avons pas d’autre solution. Il faut que nous essayions de façonner ce processus ensemble. Nous ne pouvons ni l’empêcher, ni le ralentir »

et histoire de gros sous

Autre élément décisif qui explique le changement de ton des Russes : la situation intérieure en URSS. Car non seulement les critiques contre la politique étrangère et économique de Michail Gorbatchev se multiplient mais l’Union soviétique a aussi besoin d’argent, de beaucoup d’argent. Les généreuses aides financières offertes par Bonn à Moscou jouent un rôle déterminant dans l’amélioration des relations germano-soviétiques.

Bildgalerie Hans-Dietrich Genscher 2plus4-Vertrag Moskau 1990
Dernière étape avant la Réunification: Signature du traité 2+4 le 12 septembre 1990 entre les deux Allemagnes et les quatre alliés.Image : AP

Avant sa visite en Russie, Helmut Kohl assure déjà à l’URSS un crédit de 5 milliards de marks qui contribuera à la survie politique de Michail Gorbatchev. Après sa visite, le chancelier accorde également des compensations financières pour le retrait définitif des troupes soviétiques stationnées sur le sol est-allemand.

Une générosité qui fera dire à certains que l’URSS a bradé l'ex-Allemagne de l'Est. Mais Moscou affirme qu’elle a voulu offrir à l’Allemagne son unité. Julij Kwidjinski, était à l’époque adjoint du ministre soviétique des Affaires étrangères

« Ce que le côté allemand a payé représentait des petites sommes comparées aux objectifs globaux. Nous n’avons rien demandé de plus. Du moins, on ne peut pas nous reprocher d’avoir vendu la RDA à l’Occident pour une somme considérable »

Quoi qu’il en soit, l’air du Caucase aura été bénéfique puisque un peu plus de trois mois après cette rencontre, l’Allemagne sera réunifiée.

Auteur: Konstanze von Kotze, Rupert Wiederwald
Edition: Anne Le Touzé