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L’Allemagne appelée à être médiatrice au Cameroun

11 novembre 2020

Actuellement présidente de l’Union européenne, l’Allemagne pourrait jouer un rôle de médiation dans la crise anglophone. Mais le gouvernement semble d’hésiter.

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Deutschland Bundeskanzlerin Angela Merkel
Image : Michael Kappeler/AFP/Getty Images

L'appel à agir n'est pas nouveau : l'Allemagne devrait intensifier ses efforts de médiation au Cameroun. Tout récemment, deux attaques sanglantes contre des écoles dans la région anglophone du pays ont souligné l'urgence de la situation. Au moins sept écoliers y ont perdu la vie, d'autres ont été blessés ou enlevés.

Selon deux importantes organisations caritatives allemandes, le pays devrait d'autant plus profiter de sa présidence de l'Union européenne et du fait qu'elle est membre non-permanent du Conseil de Sécurité de l'Onu pour faire avancer le processus de la paix au Cameroun.

Une "responsabilité historique"

Au-delà de cette visibilité accrue sur la scène internationale, c'est aussi l'histoire commune entre l'Allemagne et le Cameroun qui joue un rôle. "L'Allemagne est évidemment l'ancien colonisateur, elle a probablement toujours une certaine responsabilité historique si on considère que le passé colonial allemand n'était pas exempt de répression", explique Andreas Mehler, professeur de la politique du développement et directeur de l'institut Arnold Bergstaesser à Freiburg à la Deutsche Welle (DW).

Même si le Cameroun a été divisé entre la France et l'Angleterre après la chute de l'Empire germanique en 1919, une division dont témoigne encore le conflit actuel, la responsabilité allemande dans cette crise ne devrait pas être ignorée.

Pour Andreas Mehler, "le mandat français de la Société des Nations est dans la mémoire de beaucoup mais déjà avant, les autorités allemandes n'étaient pas des anges."

Berlin reste réservée

Cependant, le gouvernement allemand s'est montré plutôt prudent jusqu'au présent - bien que l'Allemagne se trouve parmi les bailleurs de fonds le plus importants du Cameroun. Ni le ministre des Affaires étrangères, ni la chancelière, n'ont visité le pays. Et cela alors que le chargé de l'Afrique du gouvernement avait annoncé il y a un an qu'il allait s'engager pour un engagement plus fort de l'Allemagne au Cameroun.

De la même façon, le chef du groupe parlementaire pour l'Afrique centrale au Bundestag a récemment rappelé l'invitation qu'il avait lancée à la chancelière et au ministre pour aller se rendre sur place. Pourtant, pour l'instant, de tels voyages diplomatiques ne sont pas prévus, à en croire la chancellerie et le ministère des Affaires étrangères.

Par ailleurs, pour qu'une médiation allemande soit possible, il faudrait tout d'abord un dialogue franco-allemand sur le sujet, estime le député du Bundestag et spécialiste de la prévention civile des crises, Ottmar von Holtz. "Je pense qu'il sera nécessaire que le gouvernement allemand intensifie ses effort pour forcer la France à approuver des initiatives internationales pour le Cameroun."

Augmenter la pression

Selon Ulrich Delius, directeur de l'Organisation humanitaire Société pour les peuples menacés, "il faudra essayer de faire davantage pression sur le gouvernement du Cameroun, afin qu'il accepte – pour commencer- qu'il y a un grand conflit à l'intérieur du pays qui doit être résolu d'une façon paisible."

La Suisse a elle aussi tenté dans un passé récent de jouer un rôle de médiateur dans la résolution du conflit séparatiste au Cameroun, mais sans grand succès. Pour Andreas Mehler, cela montre qu'une action diplomatique doit reposer sur une approche multilatérale. "Je crois qu'un effort conjoint des partenaires bilatéraux serait le bienvenu, avec l'Union Africaine comme acteur principal."

Un conflit de langue

La crise anglophone au Cameroun dans le sud-ouest du pays dure déjà depuis quatre ans. La population de cette région se voit marginalisée par la majorité française, les séparatistes demandent même l'indépendance de l'Etat. Cependant il n'est pas question de parler d'un mouvement homogène. Les groupes des séparatistes sont plutôt fragmentés dans la guerre contre le gouvernement à Yaoundé.

C'est aussi pourquoi la question des responsabilités dans les cas récents n'est pas si facile à clarifier. Dans le passé, des écoles étaient des cibles fréquentes des milices régionales. Par contre, les organisations humanitaires imputent aussi une certaine responsabilité à l'armée camerounaise. Jusqu'au présent, le conflit a provoqué la mort de plus de 3.000 personnes et environ 700.000 d'autres sont déplacées.