L'Allemagne et le Kenya signent un accord migratoire
13 septembre 2024L'Allemagne et le Kenya ont signé un accord migratoire, à l’occasion de la visite ce vendredi (13.09) du président kényan William Ruto à Berlin, où il a rencontré le chancelier Olaf Scholz.
L’accord représente un double enjeu pour l’Allemagne : d’une part, il s’agit de pouvoir expulser plus rapidement les demandeurs d’asile kényans déboutés vers le Kenya. De l’autre, l’accord s’inscrit dans la longue liste des initiatives destinées à recruter de la main d’œuvre qualifiée à l’étranger, alors que dans le même temps, des pays comme le Kenya font face à un chômage élevé chez les jeunes.
Berlin a déjà conclu des accords de coopération similaires avec la Géorgie, l’Inde, le Maroc. Après le Kenya, un deal doit également être signé avec l’Ouzbékistan.
La Colombie a également fait l’objet d’une visite d’une délégation allemande au début de l’année. Le Ghana, ou encore le Kirghizistan et la Moldavie, sont également approchés.
Comme le note la Tagesschau, les objectifs varient. Pour la Géorgie, il s’agissait de faire baisser le nombre de demandes de protection en Allemagne. Celles-ci ont chuté de 60 à 70 % depuis la conclusion de l’accord.
Avec le Maroc, l’enjeu était de rétablir des relations diplomatiques longtemps brouillées.
800 Kenyans dans l’obligation de quitter l’Allemagne
Dans le cas du Kenya, l’aspect renvoi de migrants semble plutôt secondaire. Pendant les huit premiers mois de l’année, à peine 225 Kenyans ont déposé une première demande d’asile en Allemagne. En revanche, le taux de protection est très faible. Seule une poignée, près d’une dizaine de personnes, ont obtenu un statut de protection.
D'après les chiffres officiels, environ 15.000 personnes originaires du Kenya vivent en Allemagne, et un peu plus de 800 sont obligées de quitter le pays en raison de l’absence de permis de séjour.
C’est peu, considérant que fin juin, près de 227.000 personnes étaient dans l’obligation de quitter le territoire, d’après les chiffres de la plateforme d’information sur la migration "Mediendienst Integration".
L’absence de documents de voyage rend les expulsions souvent impossibles. Dans l’accord signé aujourd’hui, au-delà d’un effort pour identifier les personnes susceptibles d’être renvoyées au Kenya, Nairobi devrait désormais accepter les passeports et les cartes d’identité expirés comme document de voyage.
Pénurie de main d’œuvre
Si l'enjeu de ces expulsions semble marginal, l’accord montre encore une fois que l'Allemagne tente de trouver de la main d’œuvre partout où cela est possible.
Les plus grandes pénuries concernent les secteurs des soins de santé, de l’hôtellerie-restauration et de l’informatique.
Cela se traduit par des programmes de partenariats entre les agences de l’emploi, des formations pour apprendre l’allemand.
Des entreprises se spécialisent pour recruter par exemple des infirmiers et infirmières dans des pays aussi lointains que les Philippines, l’Indonésie, le Vietnam ou le Brésil. Dans ce cas précis, selon une estimation, l’Allemagne a besoin d’environ 150.000 infirmières supplémentaires.
Le pays a aussi instauré cet été un système d’immigration à points, pour délivrer des visas de travail aux travailleurs qualifiés issus de pays en dehors de l’Union européenne.
"Win-win"
En visite à Nairobi au printemps de l’année dernière, Olaf Scholz avait vanté les accords de coopération migratoire comme étant une "situation gagnant-gagnant pour les pays qui y participent".
Depuis sa visite, le Goethe Institut à Nairobi explique être submergé de demandes pour assister aux cours d’allemand. La liste d’attente est longue, selon sa directrice, dans une interview au Deutschlandfunk.
A chaque fois que l'institut culturel allemand ouvre les nouvelles inscriptions, il ne faut pas plus de deux heures pour que le prochain trimestre de cours soit rempli.
Au Kenya, ce sont surtout les diplômés en informatique qui seraient concernés par les recrutements.
A Berlin, le président William Ruto a salué une jeunesse kényane créative et pleine d’énergie, tout en rejetant les craintes d’un drainage des cerveaux, c’est à dire un exil des diplômés pourtant nécessaires au développement de l’économie du Kenya.
Dans le même temps, le président a dit espérer que le Kenya pourra accueillir des entreprises allemandes en mesure d’offrir des opportunités d’emploi à la population locale.