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"Cette attaque montre qu'aucune région n'est à l'abri"

10 août 2020

Le spécialiste des questions sécuritaires, le professeur Boubacar Diallo, analyse les conséquences de l'attaque survenue dimanche (09.08) au Niger. Elle a fait 8 morts dans la zone de Kouré, à une heure de Niamey.

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Niger Französische Touristen getötet
Image : AFP

DW : Professeur bonjour, des hommes armés ont tué huit personnes dont six Francais et deux Nigeriens dans la zone de Kouré, à une soixantaine de kilomètres de Niamey. Quelles sont les conséquences de cette attaque pour la région ?

Boubacar Diallo : La première conséquence est d'abord psychologique. Ça montre, comme on l'a dit depuis longtemps, qu'aucune des régions du Niger n'est à l'abri d'une attaque terroriste, étant donné le mode opératoire des groupes armés. Il y a aussi une conséquence sécuritaire. Tout le monde est surpris de cette action, on ne sait pas si c'est un relâchement de la part des forces de défense et de sécurité. En tout cas, à Niamey, il y a les drones, il y a plusieurs casernes, plusieurs unités - la Garde nationale, la gendarmerie - donc c’est surprenant que cette attaque se produise.

La zone de Kouré abrite les derniers troupeaux de girafes d’Afrique de l’ouest.
La zone de Kouré abrite les derniers troupeaux de girafes d’Afrique de l’ouest. Image : picture-alliance/robertharding/Godong

DW : Vous l'avez dit, c'est une zone sécurisée et peuplée, le trafic routier est très dense, des camions et bus y passent de jour comme de nuit. Que faut-il alors craindre ?

Boubacar Diallo : Il faut tout craindre. Pas simplement parce que c'est une zone peuplée, mais simplement parce que c'est aujourd'hui l'une des stratégies des groupes armés avec le phénomène de la dispersion. Les forces internationales, les forces nationales et régionales sont intervenues pour les disperser dans les zones où ils ont constitué des espaces retranchés, comme par exemple dans le Liptako et la Tapoa en particulier dans le parc W. C'est une région un peu plus forestière et qui correspond parfaitement à des formes de refuge pour les groupes armés. Mais Kouré c'est aussi une zone cynégétique, c'est-à-dire une zone périphérique au parc W. Donc il est à craindre que les groupes ne cherchent à constituer des bases ou en tout cas des zones grises pour continuer à mettre la pression sur les forces de sécurité.

DW : Kouré est à une heure de Niamey, est-ce que la capitale doit renforcer davantage les mesures sécuritaires?

Boubacar Diallo : En réalité, depuis le début du terrorisme, Niamey est sécurisée. Mais vous savez, c'est le mode opératoire, sécurisé ou pas sécurisé avec la stratégie des groupes armés, ils peuvent frapper n'importe où. C'est toujours ce que nous essayons de faire comprendre. C'est une guerre asymétrique. Donc il ne suffit pas de sortir les chars, les drones ou les rafales pour empêcher ce genre d'action. Je pense que la vraie sécurité, il faut que les autorités de la région puissent avoir le courage de négocier avec les leaders des groupes terroristes.

"Il ne fallait pas laisser ces humanitaires sortir sans être protégés"

DW : Les présumés terroristes ont tué huit personnes. Ils auraient pu les enlever, tout simplement non?

Boubacar Diallo : Oui mais ils ont besoin d'un coup d'éclat macabre. Et malheureusement, ils ont réussi. Il ne fallait pas laisser ces humanitaires sortir sans être protégés, c'est incompréhensible. Á la fois, il y a la responsabilité des autorités départementales de la région de Tillabéry, du ministère de la Sécurité et enfin au-delà ça montre aussi la présence inutile des forces étrangères. Ce ne sont pas elles qui vont assurer notre sécurité. Ces groupes terroristes vont continuer à faire du mal tant que nous ne changeons pas de stratégie de lutte antiterroriste.

DW : Le groupe Al-Qaïda a nié toute implication. Mais à votre avis, qui peut être derrière cette attaque meurtrière?

Boubacar Diallo : Tous peuvent être derrière. Il peut nier mais ce qu'il faut se dire avec le développement de ce qu'on appelle le terrorisme domestique, des groupuscules indépendants sont capables de prendre des initiatives sans recevoir l'ordre de personne. Cela est justement l'une des conséquences de l'absence de négociations, de discussions avec ces gens pour arrêter la violence dans la région.

Nafissa Amadou Journaliste au programme francophone de la Deutsche Welledw_afrique