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Conditions de détention déplorables dans les prisons de Beni

Pascal Mapenzi
17 septembre 2024

Les violences à la prison de Makala, à Kinshasa, qui ont fait 129 morts selon les autorités congolaises, ont mis en lumière les mauvaises conditions de détention dans les prisons en République démocratique du Congo.

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Les prisons de Beni sont surpeuplées
Les prisonniers vivent dans des conditions extrêmements difficiles à BeniImage : John Kanyunyu/DW

De nombreux rapports d’organisations des droits de l’Homme ont en effet dénoncé la surpopulation carcérale, le manque de nourriture, les problèmes d'accès à l'eau et aux soins de santé. Ces mauvaises conditions provoquent chaque année la mort de centaines de détenus, dont la plupart étaient en attente de leur procès. A la prison de Beni dans la province du Nord-Kivu, dans l’est du pays, là aussi, les conditions de vie des détenus sont très préoccupantes. 

Au moins 1.500 détenus logent dans les différentes cellules de la prison de Kangbayi à Beni. A l'origine, celle-ci avait été construite pour héberger seulement 250 personnes.   

Les femmes et les mineurs, eux, sont logés dans des bâtiments séparés dans une autre partie de la ville. Un ancien détenu, qui a tenu à rester anonyme et que nous appellerons Christian, a passé trois mois dans cette prison. Il parle d’un mouroir et non pas d’une maison d'arrêt.  

« Kangbayi n’est pas un lieu d’éducation, c’est un lieu de la mort, il n’y a pas de vie là. Les civils cohabitent avec des militaires et des grands criminels. Beaucoup de gens décèdent sans être jugés. On mange difficilement, on dort entassés les uns sur les autres et de nombreux détenus n’ayant pas de place pour dormir, passent les nuits debout dans des eaux stagnantes non évacuées. Il y a même ceux qui passent les nuits dans les toilettes. C’est tout ça qui aggrave leur état de santé et qui révolte les détenus. Nombreux ont des diarrhées, la tuberculose, des maux de ventre, la malaria, la gale, la dermatose, il y a des insectes qui piquent … et facilement on se contamine avec cette promiscuité. »  

Des repas insuffisants

En plus des rations alimentaires fournies par l'Etat, les autorités de la prison reconnaissent l’apport des églises et d’autres personnes de bonne volonté. Mais pour Christian, l’ancien détenu, ce n’est pas suffisant et il faudrait faire travailler les détenus.  

«Il y a une grande concession autour de la prison. Ces terres peuvent être cultivées par les prisonniers et produire de la nourriture. Ainsi, on n'assisterait plus à des prisonniers qui meurent à cause de l'insuffisance alimentaire. Parmi les détenus, il y a aussi des électriciens, des maçons, des cordonniers, des plombiers, des mécaniciens, … il y a des petits travaux qu’ils pourraient exécuter à la prison et être payés comme des journaliers.»  

A la mi-août, soit avant le drame de la prison de Makala à Kinshasa, le Bureau conjoint des Nations unies pour les droits de l'Homme a dénombré 238 décès en prison en RDC depuis le début de l’année.   

La prison de Kakwangura dans le Nord-Kivu
La prison de Kakwangura dans la commune de Butembo Image : John Kanyunyu/DW

L’avocat Elie Kiyonga, de la Convention pour le respect des droits humains, décrit un système répressif où les incarcérations sont trop fréquentes.  

«Les dossiers doivent être traités avec célérité. Il y a des dossiers qui sont traités avec une certaine lenteur. On va faire libérer deux ou trois prisonniers aujourd’hui, mais demain on en amène dix ou quinze. Il y a des arrestations intempestives, parfois pour des faits graves ou pour des faits bénins.»  

Les responsables de la prison de Beni n’ont pas voulu répondre à nos questions et nous ont refusé l’accès à l’intérieur de la prison. Ils n’ont pas voulu non plus commenter le drame survenu à la prison de Makala.  

Pour rappel : le 20 octobre 2020, la prison de Beni avait été attaquée tôt le matin. Une attaque revendiquée par l'Etat islamique en Afrique centrale. Selon les autorités, au moins 1.300 prisonniers s'étaient évadés ce jour-là. La plupart étaient de grands criminels en attente de leur procès.   

Mais les circonstances de cette spectaculaire évasion restent encore floues. Depuis lors, un mur en moellon a été construit autour de la prison pour renforcer sa sécurité.